“On n’a rien sans rien !” : Fanch Delanoe, le breton aux fourneaux chez Kaempff-Kohler

Juil 26, 2024

Du haut de ses 43 berges Fanch Delanoe fait un rapide retour sur une carrière culinaire particulièrement diversifiée et inspirante. Il en a vu des choses en gastronomie – et c’est loin d’être fini !

 «Pour moi l’apprentissage était l’étape déterminante  parce que lors de mes 3 années passées chez Pascal Cochennec au Céline à Bruz, j’ai non seulement appris les bases du métier, mais cette période m’a en quelque sorte ouvert les yeux. Au bout de cette expérience je savais ce que je voulais faire de ma vie ».

Fanch, le Breton a logiquement passé les premières années de sa vie professionnelle au pays.

L’apprentissage une fois bouclé, son affinage passe par la dure école de l’Auberge Grand Maison, chez Jaques Guillot, à Mur de Bretagne dans les Côtes d’Armor.

Ce chef étoilé de la vielle école était connu pour son intransigeance : on y fait la cuisine, mais au cours des longues journées de travail on aiguise  aussi les couteaux, passe à la plonge, astique le piano midi et soir ou s’occupe de la décoration florale.

Conclusion du jeune aspirant chef« C’était très dur, mais cela en valait la peine ! »

Au bout de 2 ans vint l’heure du choix: le Martinez à Cannes ou le Luxembourg. Fanch prend la deuxième option et passe 5 ans chez Gérard Mathes à Ahn, pour ensuite rejoindre la maison Speltz.

Il fait l’ouverture du « Sud » à Clausen sous Christophe Petra, un autre étoilé, avant sa reconversion dans le take away-traiteur Schumacher.

« C’était un choix de vie, avec des horaires qui me convenaient mieux à moi et à ma famille. J’ai repris depuis le début avec les sandwichs pour aboutir au chaud… et donc encore une fois aux activités du soir. »

En 2017, après 8 ans, il arrive chez Kaempff-Kohler, d’abord comme cuisinier, ensuite comme responsable du froid, pour passer chef en 2022.

Aujourd’hui il dirige une brigade de 12 cuisiniers et 2 plongeurs dans l’atelier de production à Niederanven.

La cuisine – une confession de foi

Le frais, la qualité haut de gamme, la proximité (le bœuf marque nationale, la moutarderie voisine à seulement une centaine de mètres des ateliers (pour ne citer que ceux-là), les produits luxembourgeois et les fournisseurs luxembourgeois fiables, en l’occurrence La Provençale, Luxlait et Grosbusch), voilà les éléments qui tiennent la base de la cuisine de Fanch Delanoe et d’ailleurs aussi de l’identité Kaempff-Kohler.

« Nous soutenons l’économie locale. J’aime travailler les produits de saison et de préférence locaux – même si aujourd’hui le client est habitué à manger des fraises tout au long de l’année. Il n’y a plus de saisons, mais je reste un adepte des asperges et de l’agneau au printemps, des moules en juillet, du gibier en automne et des potirons en hiver.»

La qualité passe avant tout : depuis le produit de base, la manière de le travailler jusqu’à la présentation. Le visuel est un élément non négligeable – tout doit être « propre et net » (citation Fanch Delanoe).

Quant aux recettes il s’agit de trouver le bon équilibre entre les plats signature traditionnels

luxembourgeois, comme par exemple le pâté au Riesling, le gibier et les harengs et les nouvelles créations.

« Toujours guidés par l’idée de l’excellence et de la meilleure qualité nous innovons en permanence. Ainsi nous faisons par exemple notre propre saumon écossais fumé et gravelax. Les filets de ces poissons exceptionnels sont levés directement sur place au moment où ils sont pêchés. »

Le chef a bien compris qu’en cuisine chez Kaempff-Kohler en plus de l’obligation, il existe un grand libre choix, ce qui rend bien sûr la vie professionnelle du cuisinier plus intéressante et stimulante.

Une palette d’activités diversifiée

Chez Kaempff-Kohler le chef exerce dans le take away, le catering évènementiel et la restauration. Ce sont des styles de cuisine bien différents, un vrai défi à l’imagination et au savoir-faire de la brigade.

Depuis la pandémie, les nouveaux modes de vie et la crise économique qui s’en suivent, le take away prend une place de plus en plus importante dans la gastronomie.

« Nous devons proposer des produits de qualité traditionnels mais aussi  nouveaux. Les sandwichs, salades, bowls et compagnie doivent être conçus de manière à pouvoir être consommé assez facilement à un prix abordable », estime le chef, « tout en tenant compte des considérations d’alimentation saine et des régimes alimentaires : végétariens, végétaliens et intolérances. »

Fanch Delanoe reste en permanence à l’écoute du client, pour connaître ses attentes et ainsi de se remettre incessamment en question.

Dans le Take Away il est important de suivre les tendances, c’est une évolution personnelle permanente avec une exigence de créativité quotidienne dans l’optique du meilleur rapport qualité-prix pour le client

 La plupart de ces principes valent aussi pour le volet du traiteur évènementiel.

C’est une recherche permanente de la meilleure combinaison entre le repas, sa présentation et un lieu de fête exceptionnel.

Avec un léger haussement des épaules et un petit sourire aux lèvres le chef avoue :

« C’est mon exercice préféré. À l‘occasion des grands évènements pour lesquels nous cuisinons, j’aime être moi-même sur le terrain avec mon équipe, au plus proche du client pour avoir un feedback immédiat. C’est très éprouvant en termes de charge de travail, mais aussi d’autant plus enrichissant».

Finalement il y a la carte « restaurant » qui propose des choix de plats plus traditionnels que le chef doit marier avec des créations originales et parfois un peu surprenantes.

La cuisine de restaurant, qui se réinvente chaque jour, est fortement influencée par l’offre du moment que présente le fournisseur.

Le chef a bien relevé le défi de cet exercice particulier :

« Étant donné que chez Kaempff-Kohler l’activité restaurant est principalement axée sur l’heure de midi, avec notamment un plat du jour, il faut tenir compte de la disponibilité des produits frais et du temps restreint que le client se donne pour manger. Donc, priorité plats qui ne prennent pas trop longtemps dans la préparation. Mais là encore le défi est de présenter une qualité maximale par rapport à un prix raisonnable. » 

La personnalité du chef

Mener par le bon exemple, montrer une présence continue sur le terrain avec les sous-chefs, c’est un des principes à respecter pour se faire respecter.

« Je prône la rigueur, l’exigence, mais aussi la pédagogie, parce que depuis le Covid et les nouveaux modes de vie, l’exercice du recrutement est devenu extrêmement compliqué en gastronomie. J’encourage les jeunes à saisir l’occasion de l’apprentissage. C’est une excellente opportunité de formation, de progression et d’ouverture à la vie », souligne le chef qui fait un retour mental sur son propre apprentissage qui lui a ouvert non seulement les portes du métier.

Pour Fanch Delanoe la remise en question permanente, le refus de se reposer sur les acquis, l’évolution permanente et la et la stimulation de la créativité par la formation continue, les stages, l’ouverture au monde avec toujours un regard attentif sur les nouvelles tendances, mais aussi sur les activités de la concurrence sont les élixirs du bien-être professionnel.

« Je le referais, mais j’essaierais de voir plus de pays, de travailler d’avantage à l’étranger avant de m’établir définitivement » – et le petit sourire du coin de la bouche devient un gros sourire sur le visage du chef qui est toujours de bonne humeur.

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